Début septembre, Auchan Retail, la branche distribution du groupe Auchan, propriété de l’Association familiale Mulliez, a publié des comptes semestriels plombés par la contre-performance persistante des hypermarchés en France, et la crise qui perdure en Russie. A l’occasion d’une rencontre avec la presse à Moscou, du directeur général d’Auchan Retail (et ancien patron de la Russie), Wilhelm Hubner livre son analyse aux « Echos ».


Après les résultats décevants d'Auchan Retail au 1er semestre en France, vous avez promis un retour de la croissance des profits pour 2018. Comment comptez-vous y parvenir ?

Nos résultats au 1er semestre 2017 ont été certes en dessous de nos attentes. Mais il faut relativiser : cela ne représente environ que 20 % du résultat net annuel. En France, la dynamique dans les supermarchés et les drives a été bonne. Le vrai défi est bien sûr dans les hypermarchés, qui génèrent 80 % des ventes. Il faut réinventer le modèle ! Nous y travaillons, avec pour objectif de voir les premiers signes positifs d'ici à fin 2018. Il n'y aura pas de fermeture d'hyper en France mais, conformément à notre stratégie, nous ferons porter nos efforts sur le parcours client digital, le service et l'offre.


Vos expériences russe et chinoise vous aideront-elles ?

Nous développons des modèles adaptés à chaque pays. Notre force tient dans une approche globale associée à des démarches locales. En Russie, nous sommes le 3ème acteur du marché et, en Chine, notre succès fait de nous le 2ème acteur alimentaire et le 6ème groupe de distribution tout canal confondu. Auchan Retail, c'est 17 pays qui s'échangent mutuellement de bonnes pratiques au sein d'une fédération où la France ne représente qu'un tiers du chiffre d'affaires.


Mais en Russie, comme en France, vous êtes en retard sur la concurrence dans le commerce de proximité...

C'est un fait. La culture Auchan était celle de l'hypermarché. Et nous avions l'habitude de travailler en silo. Aujourd'hui, cela change : au 1er semestre, 90 % des ouvertures étaient des magasins de proximité. Sur ce format, il y a en Russie un potentiel de 10.000 points de vente. Ce serait bien, à partir de 2018, d'en ouvrir un par jour. Et nous aurions les moyens financiers pour le faire. Il reste de bons emplacements. Cette dynamique est identique dans tous nos pays. Nous venons d'ouvrir des magasins de proximité en Hongrie, au Vietnam, en Espagne, au Portugal, en France, en Roumanie et en Italie.


En Chine, votre priorité n'est-elle pas plutôt l'e-commerce ?

Dans ce pays, comme dans tous les autres, notre priorité est le multi-format « phygital », magasin physique et canal numérique, afin de répondre aux attentes de nos clients. Par exemple, nous avons lancé une offre d'achat de produits frais en ligne avec livraison à domicile en moins d'une heure. En Chine, ils savent ce que sont la vitesse et l'innovation. Beaucoup de Chinois n'ont pas de frigidaire : dans nos magasins, nous cuisinons donc des plats qu'ils peuvent acheter et se faire livrer à domicile. Prendre ce virage du « phygital », c'est notre priorité partout.

Benjamin Quénelle